Hong Kong – La dixième édition du Hong Kong Wine and Dine Festival organisée en partenariat avec les Vins de Bordeaux se tenait du jeudi 25 au dimanche 28 octobre sur les rives du Victoria Harbour. Une fête de la gastronomie et du vin accueillant plus de 180.000 visiteurs sur un site impeccablement organisé, avec une visibilité remarquable pour les vins de Bordeaux. Chapeau bas aux organisateurs!

Du shopping à la gastronomie… et aux vins de Bordeaux
Le tourisme est une ressource clé pour Hong Kong. La ville de 8 millions d’habitants a d’ailleurs accueilli près de 60 millions de visiteurs en 2017, ce qui représente 5% du produit intérieur brut et 7% de l’emploi total.  Si Hong Kong a longtemps été la destination phare pour les amateurs de shopping du monde entier, la concurrence d’autres grandes villes a fini par se faire ressentir et il a fallu aller de l’avant. Hong Kong a donc décidé de miser sur le développement de la gastronomie afin d’offrir une expérience unique à ses visiteurs. Pour cela, il fallait bien sûr attirer des chefs de renom et encourager les talents locaux. Mais il fallait également mettre le vin à l’honneur, sans quoi la gastronomie se sent toujours un peu orpheline. Il y a 10 ans Hong Kong a pris la décision majeure de lever les taxes sur les importations de vins; et dans le même temps, la première édition du Hong Kong Wine and Dine Festival voyait le jour en partenariat avec les Vins de Bordeaux, le tout à la demande explicite de Hong Kong.

Les importations de vins de Bordeaux à Hong Kong
Ok, on a levé les taxes, mais cela va-t-il de paire avec une évolution des importations de vins de Bordeaux? J’ai posé la question au sémillant Christophe Chateau qui confirme l’augmentation des ventes mais se demande – en toute objectivité, un immense sourire en travers du visage – si c’est dû à la levée des taxes ou à la présence des vins de Bordeaux en tête d’affiche du Hong Kong Wine and Dine Festival.

De 2007 à 2017, les importations de vins de Bordeaux à Hong Kong sont passées de 28.000 HL à près de 80.000 HL en volume et de 50 millions d’euros à 317 millions d’euros en valeur, pour représenter 77% des importations de vins d’AOP en volume et 83% en valeur. Une performance remarquable, mais pas un long fleuve tranquille. En effet, en 2011, les scores records dépassaient les 100.000 HL pour un valeur de frôlant 350 millions d’euros. On observe ensuite un recul sur quelques années pour atteindre le point le plus bas en 2014 avec 82.000 Hl valorisés à 214 millions d’euros. Depuis, les affaires reprennent pour les vins de Bordeaux dont les importations de 2017 ont encore progressé de +5% en volume et +4% en valeur par rapport à 2016.

Quand on sait que la population de Hong Kong approche les 8 millions d’habitant avec une consommation annuelle moyenne de vin de 5 litres par personne, on se dit qu’il y a encore une belle marge de progression sur ce marché.

Et la Belgique alors ?
 A priori, un belge ne tiendrait pas plus de 3 mois au régime hongkongais, vu que nous consommons 26 litres de vin en moyenne par an et par personne. Et comme nous sommes environ 11 millions à nous plaindre quotidiennement de la pluie ou des taxes au plat pays, nous devrions nous classer bien devant Hong Kong au championnat du monde de l’amour du vin de Bordeaux. Bon à savoir, le PNB par habitant de Hong Kong et de la Belgique sont très proches et se situent autour des 42.000 dollars. En 2017, nos importations de vins de Bordeaux ont dépassé la barre des 200.000 HL en volume et de 103 millions d’euros en valeur. Nous consommons donc encore 3 fois plus de vins de Bordeaux que les amateurs de Hong Kong, mais pour une valorisation qui représente à peine 55% de celle de Hong Kong. Cela veut-il dire que nous ne buvons pas les mêmes vins de Bordeaux ? Tout juste, Auguste !

A Hong Kong, les bouteilles de Bordeaux de plus de 15 euros représentent 40% du volume et 90% de la valeur consommée. Alors que chez nous, ces vins ne représentent que 6% du volume et 34% de la valeur. En gros, nous buvons moins cher (mais pas moins bon pour autant, hein!). A Hong Kong, les vins blancs et doux représentent à peine 2% de la consommation, alors qu’en Belgique, ils atteignent 12% pour les blancs et 1% pour les doux. Par ailleurs, nous buvons plus de Saint-Emilion, Pomerol et Fronsac (BE 15% vs HK 10%), et de Cotes de Bordeaux (BE 10% vs HK 6%), alors que Hong Kong se passionne pour les vins du Médoc (HK 35% vs BE 16%).

Sur base de ma petite expérience personnelle sur les stands de dégustation durant le festival, je suis persuadé que les vins de Bordeaux blancs, rosés, doux et effervescents vont fortement progresser à Hong Kong. L’accueil était hyper positif pour ces vins polyvalents et accessibles d’un point de vue gustatif et financier.

Le taylor du vigneron is rich
Ceux qui me connaissent un peu le savent : quand un français me parle d’un accent belge imaginaire ou d’un quelconque belgicisme au charme inégalable, j’ai un malin plaisir à lui répondre en anglais, ce qui met généralement un terme relativement abrupte à son éloquence. Mais durant ces quelques jours passés à Hong Kong, j’ai été bluffé, d’une part par la nouvelle génération qui parle un anglais tout à fait compréhensible, et plus encore par les anciens qui ne ménagent pas leurs efforts pour présenter leurs vins aux consommateurs de Hong Kong à grands renforts de « fruity », « well-balanced », « full bodied », « spicy », « sweet », « dry », etc. Bravo à tous, c’est beau de voir 50 vignerons et négociants qui mouillent le maillot (par 30 degrés, tu m’étonnes!) pour la grande famille bordelaise, en laissant de côté les querelles de clochers. Ah si vous pouviez être aussi solidaire au pays qu’en voyage !

Les vins de Bordeaux, tête d’affiche, vraiment ?
Pour le coup, le terme n’est pas usurpé, pas d’arrogance ou de nombrilisme déplacé. Les vins de Bordeaux étaient partout, tout le temps. 50 vignerons et négociants pour commencer, mais également la souriante Sophie Gaillard responsable de l’Office du Tourisme de Bordeaux Métropole, qui dispense sans relâche des conseils précieux pour profiter au mieux de son séjour dans la région, ou Sylvain Boisvert, directeur du Conseil des Grands Crus Classés de 1855 qui insiste pour être présent aux côtés de tous les Bordelais, pour l’équipe. En parlant d’équipe, ce dernier a évoqué à plusieurs une rencontre footballistique entre la Belgique et la France qui se serait soldée par victoire des « Bleus ». J’avoue que je ne savais pas à quoi il faisait allusion 😉 Sinon, les Vins de Bordeaux et la ville éponyme étaient également à l’honneur lors des discours d’ouverture par Alan Sichel, président du CIVB et Stéphan Delaux, président de Bordeaux Grands Evénements et de l’Office du Tourisme. Tout cela sans même évoquer le travail de fourmi de Astrid Deysine et Christophe Chateau qui permettent à chacun d’évoluer en toute décontraction sans oublier de tenir compte de spécificités culturelles de Hong Kong. Même le spectacle son et lumière affichait le B de Bordeaux dans le ciel de Hong Kong, un peu comme à la fin de d’un concert de Rock (dont Francis Cabrel n’aurait pas fait la première partie – private joke). N’oubilons évidemment pas le travail de fond de l’école des vins de Bordeaux qui dispense de nombreuses animations et combine agréablement technique de dégustation et jeu à travers un Bordeaux Black Jack qui fait tourner la tête aux consommateurs de Hong Kong, tout cela sous l’oeil vigilant de Valérie Yaigre. Mais le plus remarquable, ce sont les milliers de verres de dégustation servi avec enthousiasme par tous les représentants de la délégation. Je m’y suis essayé, avec la complicité bienveillante de Bernard Farges et Hervé Grandeau, c’est un travail intensif ! Merci d’ailleurs à Guillaume Bonnaud qui tire plus vite que son ombre pour ses clichés et ses conseils, et à Xavier Sota pour la façon très juste avec laquelle il décrit mon travail (tu ne veux pas devenir mon agent?).

Sur ce rendez-vous pour la prochaine édition belge, avec Eat!Brussels Drink!Bordaux au Parc de Bruxelles en Septembre 2019.