Halle, je connais un peu, et je m’en souviens beaucoup. Ma grand-mère y habitait un petit appartement où l’on était toujours très bien accueilli, pour dîner, à 12 heures précises, comme ça c’était fait. Le marché, la basilique, la rue piétonne, le Delhaize où l’on achetait du lard salé que l’on faisait semblant de dé-saler en le rinçant à l’eau, le canal, la caserne des pompiers, les parties de couillon, les gens qui parlaient flamand mais qui savaient aussi le français, ce qui était une bonne chose vu que ma grand-mère ne savait pas le flamand, mais ça ne l’empêchait pas d’aller à la messe à la basilique où elle faisait ses prières en même temps que les autres même si elle ne comprenait rien du sermon. J’aimais beaucoup ma grand-mère. C’était ma marraine.

C’est donc avec grand plaisir et une pointe de nostalgie que j’ai choisi de passer une soirée au restaurant Les Eleveurs de Andy de Brouwer. Et pour profiter pleinement de la soirée sans se soucier du très juste « boire ou conduire, il faut choisir », j’ai réservé une chambre dans l’hôtel adossé au restaurant (et géré par Amanda, la soeur de Andy). Donc, au programme, petite balade dans le vent et la pluie, entre lèche-vitrine et recherche de mes souvenirs, ensuite un petit sauna et une courte sieste dans la chambre wellness (tout bon plan), avant de passer à table.

A 19h30, la salle est déjà bien remplie, on est accueilli avec le sourire avant de s’installer confortablement. L’acoustique n’est pas parfaite, mais les chaises sont confortables, les tables spacieuses et espacées, on ne partage pas la conversation des autres clients. Cool, on n’est pas à Paris. Et puis, la fête commence. Un cocktail maison, moitié gueuze Cantillon, moitié effervescent belge Schorpion, pour lire le menu. Il y en a pour tous les goûts et tous les budgets, mais une chose saute aux yeux : on a le souci du détail et chaque plat propose une petite touche originale, bien choisie, soignée. Ah oui, en cuisine, c’est Michel Borsy, qui n’est pas un débutant. J’ai envie de goûter une dizaine d’entrées et de plats, faudra que je revienne (au minimum pour les croquettes aux crevettes, les carbonnades, le tartare maison,…) mais cette fois, je prends le menu du marché, 4 services pour 55 euros, ça s’annonce très bien.

Menu du marché

Entrée froide : “Vitello tonnato” – câpres frits – légumes croquants
Entrée chaude :   Huitres chaudes au Josper BBQ – algues fumées – Avruga – crème de citron
Plat principal : Suprême de canard sauvage – girolles – pommes de terre vendangeur – jus des carcasses
Dessert :              Poire-pomme – sorbet “Earl grey”-tea

 

Et pour le vin, je me fais plaisir en lisant la carte. Un vrai travail de recherche, de précision et de présentation. Des blancs, des rouges, des bulles, du bio, de la biodynamie, du naturel, des classiques, des ovnis. Il y en a quelques uns qui me tentent vraiment (et je souris en découvrant le Morgon Poulet-Lapierre découvert au chouette bar à vins Winefever de Laurence Lardot quelques jours auparavant) mais bon, nous ne sommes que 2 à table ce qui nous limite à 2 bouteilles, un peu juste pour accompagner le menu de façon adaptée. Je fais donc confiance à Andy de Brouwer et opte pour la formule vin (32 euros pour le menu du marché), et j’ai vachement bien fait !

Pour le manger cuisiné par Michel Borsy, tout est fin, précis, mais sans être pédant. Les service est souriant, rapide, efficace et attentif. Pas le temps d’avoir soif ni de s’impatienter entre les services. C’est de la vraie bonne cuisine que l’on a du plaisir à manger et à partager. Le veau du vitello tonnato est rose, tranché très finement, sans doute cuit à basse température, à des années lumières des semelles de veaux desséchées que l’on confondrait avec du porc et servies dans de trop nombreux établissement. Et le thon utilisé, il est frais hein, ce n’est pas du thon en boîte. Et avec ceci ? Une petite Arvine venue du Gard, tout en finesse, parfait. On enchaîne avec les huîtres fumées au bbq Josper accompagnées d’une Manzanilla (César Roman n’aurait pas dit mieux !) aux arômes de fruits secs, de noix et de fumé. Avec le canard, je découvre la cuvée Cyclope du domaine Le Petit Domaine. Un vin de pays de l’hérault (IGP) 100% carignan en biodynamie, sans sulfite ajouté. Un passage en carafe est nécessaire pour l’aider à s’ouvrir. Le vin est fruité, propre et net. Un réel plaisir. Et pour la très belle assiette de fromage (ben oui, j’ai encore fait le difficile et j’ai remplacé le dessert par le fromage), on n’y va pas par 4 chemins : c’est un Madeire (Justino’s Madiera Boal 10 Years Old). Que la vie est belle !

Et pour la touche finale, une petite Chartreuse sur glace pilée à savourer en faisant connaissance avec la maman de Andy. Une dame bien sympathique et souriante qui a bien connu les institutions du cimetière d’Ixelles, dont le Gauguin, bien  avant moi. Quelle bonne soirée, je me suis couché avec le sourire, j’ai dormi comme un bébé, et j’ai profité d’un petit déjeuner soigné – avec une vraie omelette au lard avec de vrais œufs préparée à la minute, juste pour moi. Merci Michel. Merci Andy. Merci maman de Andy. Merci Amanda. Je reviendrai, c’est certain.